La Thaïlande fait volte-face sur le cannabis : fin de l’usage récréatif confirmé

Après avoir été l’un des premiers pays asiatiques à assouplir sa législation sur le cannabis en 2022, la Thaïlande fait désormais machine arrière. Les autorités thaïlandaises ont annoncé de nouvelles mesures strictes, en particulier sur les fleurs de cannabis, qui sont désormais classées comme “herbes contrôlées” (Controlled Herbs) en vertu de la loi sur les herbes médicinales traditionnelles thaïlandaises de 1999 via un décret ministériel daté du 25 juin 2025
Ce règlement prend effet immédiatement. Il vise à prévenir et résoudre les problèmes liés à l’usage incontrôlé du cannabis, notamment ses effets sur la santé des jeunes, ainsi que les préoccupations soulevées par les autorités sanitaires et d’autres groupes de la société thaïlandaise.
Ce que cela signifie concrètement
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Toute vente, possession ou utilisation de fleurs de cannabis est désormais soumise à des règles strictes, conformément à la loi.
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Toute personne souhaitant cultiver, vendre ou transformer du cannabis doit obtenir une autorisation délivrée par les autorités compétentes.
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L’usage du cannabis est strictement limité à un usage médical, prescrit par des professionnels de santé thaïs certifiés.
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L’usage récréatif est interdit, et sa consommation dans les lieux publics constitue une infraction à la loi.
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Les produits contenant du cannabis ne doivent pas être utilisés par les mineurs, les femmes enceintes ou allaitantes.
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Il est interdit d’importer ou d’exporter des produits à base de cannabis sans autorisation spécifique.
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Les touristes sont vivement invités à ne pas acheter ni consommer de cannabis ou de produits dérivés lors de leur séjour en Thaïlande, à moins qu’ils ne soient prescrits par un professionnel de santé thaïlandais agréé.
Les visiteurs qui ne respectent pas ces lois s’exposent à des poursuites pénales, y compris à des amendes et à des peines de prison.
Ce qui est interdit
Voici les principales interdictions à connaître :
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Vente de cannabis sans licence.
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Publicité ou promotion du cannabis sur tous types de supports.
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Vente dans les distributeurs automatiques, en ligne, ou dans les lieux publics (parcs, temples, zoos, écoles, dortoirs…).
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Usage récréatif dans les commerces ou lieux publics.
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Achat ou possession par des touristes sans prescription médicale valide.
Pourquoi la Thaïlande interdit l’usage récréatif du cannabis ?
Depuis la loi de 2022, c’était devenu un peu le far west, plus de 10 000 boutiques ont émergé à travers le pays, générant un secteur estimé à près de 1 milliard de $ (voire 1,2 milliard) en 2025. Avec des concentrantions importantes de boutiques dans les lieux touristiques. Une illustration est le nombre d’échoppes qui vendent du cannabis dans le village de Koh Phi Phi par exemple et les effluves de “fumette” omniprésentes.
Cette volte-face, certes plusieurs fois envisagée, s’est concrétisée juste au moment du retrait du Bhumjaithai, parti pro‑cannabis, de la coalition gouvernementale, suite à une crise politique liée à un appel téléphonique entre la Première ministre Paetongtarn Shinawatra et le président du Sénat du Cambodge a fuité avec en toile de fond une escalade des tensions entre les deux pays.
Mais ce sont avant tout des préoccupations sanitaires et sociales, apparues assez vite après la légalisation et le développement rapide du secteur qui ont amené à cette décision. Des autorités et représentants gouvernementaux dénonçaient “un usage incontrôlé, en particulier chez les enfants” et un bond des cas d’addiction post-libéralisation
Il y a aussi eu une hausse de la contrebande internationale et des saisies de cannabis à l’export par des touristes qui ont provoqué des tensions diplomatiques—notamment avec le Royaume-Uni—et souligné des risques extérieurs .
Qui de tous ceux qui se sont lancés dans la vente de cannabis en Thaïlande ?
Parmi les très nombreux coffee shops proposant l’herbe devenue maintenant uniquement médicinale, il y avait une part non négligeable d’étrangers qui y ont vu une opportunité de faire de bons revenus. Qu’ils soient Thaïs ou étrangers, tous vont devoir obtenir une licence sous la Section 46 pour continuer leur activité et ne vendre qu’à des personnes ayant une ordonnance. Ils devront aussi se plier à ses règles:
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déclarer aux autorités compétentes la provenance, l’utilisation et le stock de leurs produits à base de cannabis.
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Les exportateurs doivent notifier chaque opération d’exportation à l’autorité de délivrance des licences.
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Les détaillants et transformateurs ne peuvent vendre du cannabis qu’à des personnes ou entités titulaires d’une licence conformément à l’article 46.
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Tout cannabis vendu doit provenir de sources certifiées, respectant les normes approuvées de culture et de récolte.
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La vente de cannabis à des fins de fumette dans des établissements commerciaux est interdite, sauf pour un usage médical certifié par des professionnels de santé agréés.
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La vente de cannabis par distributeurs automatiques ou via des plateformes en ligne est interdite.
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La publicité commerciale pour le cannabis est interdite sur tous les supports.
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La vente de cannabis est interdite dans les lieux de culte, dortoirs, parcs publics, zoos et parcs d’attractions.
Fin du tourisme fumette
Pour ma part, c’est la fin du tourisme fumette qui me réjouit le plus dans cette décision. J’avais déjà à plusieurs reprises que je ne comprenais pas que l’on n’impose pas aux consommateurs de fumer leur achats dans les coffee shops (ce qui imposait des boutiques fermées) et les laissent fumer dans l’espace public. Reste à voir si et comment tout ça sera appliqué.
La Thaïlande affirme depuis des années vouloir un tourisme plus de qualité que quantitatif, la légalisation du cannabis et surtout la façon dont elle a été gérée de manière assez anarchique n’attirait probablement pas tout à fait le profil recherché
On peut toutefois imaginer que des services de fausses ordonnances vont émerger mais les autorités vont probablement mettre rapidement de l’ordre là-dedans.
En conclusion
La Thaïlande revient sur une libéralisation historique, poussée par des raisons politiques, sanitaires et diplomatiques. La promesse d’un eldorado économique autour du cannabis s’évapore au profit d’un retour à la case médicale. Ce choix—critiqué par une industrie en pleine expansion semblait de plus en plus inévitable même si une légalisation plus encadrée avec des règles plus strictes aurait été aussi un chemin possible. Et je n’aurais pas à arracher le pied que j’avais planté dans mon jardin (pour ses vertus thérapeutiques en tisane), il est assez vite mort !